Ninja Gaiden : Ragebound - Un retour aux sources dynamique mais imparfait

Titre original : Test du jeu Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !

Il a fallu attendre 11 ans pour que la franchise de Koei Tecmo revienne des limbes avec un épisode inédit. Dans Ragebound, les ninjas font un saut périlleux arrière – en retournant au side-scroller 2D des débuts – pour mieux pourfendre un futur apocalyptique où les démons dominent le monde. En s’alliant avec son ennemi de toujours, le clan de Ryu Hayabusa a-t-il cédé à la facilité ?

L’âme du dragon

Confié à la talentueuse équipe de The Game Kitchen, que l’on connaît surtout pour ses Blasphemous, Ninja Gaiden : Ragebound a des allures de nouveau départ sous ses airs de retour aux sources. Pour son studio, tout d’abord, qui met de côté le Metroidvania de sa licence phare au profit d’un side-scroller 100 % action/plates-formes. Pour Ninja Gaiden, aussi, qui nous demande d’incarner un personnage inconnu au bataillon, Kenji Mozu, plutôt que tuer du monstre dans le costume sombre du légendaire Ryu Hayabusa.

Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !

La dernière fois que la série nous avait mis dans la peau d’un autre ninja que Ryu, avec le mal aimé Yaiba, les choses s’étaient mal passées. Heureusement, l’ami Kenji est autrement plus combatif. Face une menace venue de l’Enfer qui s’abat sur son village, le jeune ninja est contraint de faire équipe avec Kumori, une tueuse du clan ennemi de l’Araignée Noire. À deux, les épaules sont plus fortes pour porter le sort de l’humanité, n’est-ce pas ?


Oh mon Dieu, ils ont tué Kenji !

Contrairement à d’autres volets de la franchise où l’on passe d’un personnage à l’autre selon ce que décide le jeu, Kumori “habite” le corps de Kenji à la suite d’un drôle de rituel. Quand la représentante de l’Araignée Noire habite nos pensées, il y a de quoi tisser des liens indéfectibles ! Cela signifie pour le joueur qu’il bénéficie de pouvoirs annexes, ceux de la tueuse, en plus de ceux du ninja. En échange de quelques points de Ki à récupérer en tuant les opposants, il est ainsi possible de balancer des kunais au loin ou d’activer une arme arachnéenne (kama, chakram, grenade, bouclier, etc.). Quand tous les voyants sont au vert, l’aventurier a même l’opportunité d’activer une magie de la mort qui tue (Jutsu), d’attaque ou de soin.

Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !

Kumori permet également d’entrer furtivement dans le monde immatériel afin d’aider Kenji à progresser, en ouvrant une porte en passant par des endroits normalement inaccessibles, par exemple. Cependant, ne vous attendez pas à des modifications drastiques des niveaux à la Soul Reaver. Ici, seules des plates-formes et des ennemis apparaissent. Ces séquences qui auraient pu être intéressantes se révèlent finalement un peu laborieuses pad entre les mains. Il y aurait eu moyen d’aller plus loin dans la proposition, mais The Game Kitchen a sûrement préféré ne trop pas diluer l’expérience.


Ne pas confondre vitesse et précipitation

Conformément à ce qui a donné ses lettres de noblesse à la licence par l’intermédiaire des trois premiers épisodes canoniques, Ninja Gaiden Ragebound est un jeu d’action en 2D avec pas mal de plate-forme où le héros dispose d’une large palette de mouvements. Salto vers l'avant ou l'arrière, esquive, accroupissement, escalade, saut retourné en prenant appui sur un mur, suspension à des éléments du décor, attaque à l’épée… la liste est longue. Le titre récompense le joueur qui sait bouger, mais punit celui qui part dans tous les sens. Bien que les hitboxes soient généreuses, une esquive lancée au mauvais moment ou un saut hasardeux enclenché par pur mécanisme de défense coûtent des points de vie.

Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !

Les absences de dashs aériens et de double-sauts ont de quoi dérouter en 2025, surtout quand quasiment tous les autres jeux du genre en ont, mais Ragebound préfère encourager l’adresse. Ici, il est bel et bien possible de bondir une nouvelle fois après un saut, mais pour y arriver, il faut activer le “bon-guillotine” au bon moment, c’est-à-dire quand le ninja tombe sur un adversaire. Une mécanique pas toujours simple à apprivoiser qui parlera aux fans de Cuphead ou encore de Bo : Path of the Teal Lotus. Les ennemis, aussi nombreux que variés, disposent de patterns d’attaque nécessitant de réagir vite et bien. Dasher la lame brandie vers l’avant fonctionne avec un type d’adversaire sans apporter de résultat face à un autre. Comme souvent dans les Ninja Gaiden, la concentration est primordiale.


Un p’tit truc en plus

Côté gameplay, là où Ragebound apporte du neuf à la franchise, c’est dans tout ce qui touche à la gestion de “l’hyper charge”. Dans les Ninja Gaiden 3D, le joueur déclenche des attaques meurtrières en aspirant des orbes laissés par les monstres vaincus. Cette mécanique est ici réinventée.

Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !

Certains adversaires ont une aura rouge ou bleue, indiquant quelle arme doit être prise pour les anéantir (le bleu pour Kenji, le rouge pour Kumori). En cas de réussite, le héros est en “hyper charge”. Cet état ne dure que quelques secondes et signifie que la prochaine attaque est forcément fatale, que le gugus en face soit équipé d’un bouclier ou d’écailles archi résistantes. Bien entendu, cela ne one shot pas un boss, mais les coups infligés retirent tout de même plus de points de vie. Nous précisons que le joueur a l’opportunité de se mettre en “hyper charge” de lui-même en perdant quelques PVs, mais dans un jeu comme Ninja Gaiden, la santé, c’est le plus important, surtout dans le mode Difficile qui se débloque à la fin de l'aventure. Ce game design incite donc à être particulièrement observateur et à prioriser un ennemi plutôt que de foncer dans le tas. La précision, nous disions.


Comme un odeur de salle enfumée

Empruntant l’esthétique pixel art des plus anciens épisodes de la saga, ceux sortis entre 1988 et 1992, Ragebound revient aux sources (chaudes) de Ninja Gaiden/Shadow Warriors tout en modernisant la formule. Bien sûr, nous retrouvons quelques mécaniques des épisodes 3D conçus par la Team Ninja, telles que les statues qui servent de checkpoint redonnant des PVs ou les emplettes à faire chez Muramasa. Cependant, contrairement aux Ninja Gaiden 3D, il n’y a pas de garde (mais les projectiles sont destructibles), et les opposants ne sont pas des sacs à PVs. Hormis les boss, la plupart des ennemis s’éliminent en un coup bien placé ! C’est donc un trip résolument oldschool que The Game Kitchen nous offre, quand bien même il y aurait des niveaux bonus à réussir ainsi que des défis annexes à accomplir dans les niveaux.

Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !

Avec ses gros pixels colorés, ses sprites bien animés, ses niveaux linéaires, ses musiques hyper pêchues, son gameplay “facile à jouer mais dur à maîtriser”... Ragebound est un pur plaisir arcade. C’est une de ses principales forces tout en étant aussi une de ses faiblesses. Même s’il est possible de s’équiper de pouvoirs passifs via les talismans, d’armes secondaires et de magies après avoir dépensé ses scarabées d’or chez Muramasa, la personnalisation est en retrait. Nous aurions apprécié pouvoir nous équiper de plus d’armes, de voir plus de slots, de découvrir des magies mieux équilibrées, bref, de bénéficier de plus d’options afin de tenter, d’expérimenter, d’éviter le sentiment de répétition qui s’installe inexorablement à cause d’un level design faisant dans la redite à divers moments. Que ce soit en forêt, dans les souterrains, dans des mégalopoles ou dans des laboratoires secrets, les séquences de jeu peinent finalement à se renouveler, ce qui est dommage pour une aventure aussi courte (environ 7 heures en ligne droite).


Un Enfer pavé de bonnes intentions... à destination des joueurs

Que ce soit en 2D ou en 3D, il y a un point sur lequel Ninja Gaiden a mis tout le monde d’accord : sa difficulté. Les joueurs comme la presse reconnaissent son challenge ardu, voire frustrant, dans les épisodes sortis entre 1988 et 2008. Arrêtons le suspense : Ragebound est très accessible.

Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !

Sans être trop facile, notamment grâce aux boss géniaux qui donnent du fil à retordre, il fait de nombreux pas vers le joueur pour lui faciliter la vie. À commencer par des morts peu punitives. Le ninja imprudent ne perd pas son matos et revient frais comme un garde au précédent checkpoint. Ensuite, de nombreux pouvoirs passifs donnent la faculté de regagner des PVs, à l’image de “frénésie sanglante” qui soigne le porteur à chaque fois qu’un adversaire est tué lors d’un combo supérieur à 3 morts. Il y a une arme arachnéenne qui active un bouclier salvateur, tandis que le Jutsu “fontaine de guérison” crée carrément une sphère redonnant tous les points de vie ! Malheureusement, il y a aussi pas mal de compétences pas très utiles qui auraient mérité d'être repensées. Enfin, tous les achats se font avec des éléments à trouver dans le décor plutôt qu’avec des orbes récompensant les meilleurs combos. L’exploration est donc mieux récompensée que les skills au combat, quand bien même les rangs débloqueraient des éléments à acheter.

Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !

Néanmoins, The Game Kitchen a pensé à celles et ceux qui souhaitent lancer un Ninja Gaiden avant tout pour souffrir. Si le soft propose des talismans qui amènent différents bonus, il y en a aussi qui enclenchent de terribles malus, comme le fait de devoir recommencer tout le niveau en cas de mort. Ces objets maudits ont pour seul avantage de faire gagner un rang lors du calcul du score. Vous savez donc ce qui vous reste à faire pour enchaîner les S++. Le studio espagnol donne également aux adeptes du 100 % de quoi s’arracher les cheveux dans des tableaux plus ardus via les “opérations secrètes”. Pour finir, chaque niveau a 3 objectifs annexes à accomplir, plus ou moins délicats. Autrement dit, les férus d’action qui ne jurent que par la difficulté et le challenge punitif auront de quoi mettre du gros sel sur leurs plaies sans que cela ne rende le plat immangeable pour les néophytes. Bien vu !

Ninja Gaiden Ragebound a le démon, mais c’est moins l’enfer que prévu !

Conclusion

Points forts

  • Un gameplay à la fois fun, technique, engageant
  • Ennemis variés et boss excellents
  • Direction artistique globale de qualité
  • De bonnes trouvailles pour rendre l’expérience plus facile ou plus éprouvante

Points faibles

  • Un level design pas toujours très inventif
  • On aurait aimé plus d'armes et moins de pouvoirs déséquilibrés
  • Les passages dans la dimension immatérielle avec Kumori sont anecdotiques

Note de la rédaction

16

N’ayez pas peur de vous frotter à ce Ninja Gaiden imaginé par The Game Kitchen. Si le nom de la licence peut faire trembler, Ragebound a plus d’un talisman dans son sac pour que tous les joueurs y trouvent du plaisir, du jeune Genin courageux au Jônin invincible. Très plaisant à jouer, à la fois technique et fun, il est un pur plaisir arcade comme on n’en voit que rarement. Avec un petit peu plus d’inventivité dans son level design et certaines idées mieux exploitées, il aurait atteint le rang convoité de Maître Ninja. Ryu peut en tout cas être fier de Kenji, son poulain a très bien défendu la baraque en son absence.

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