Depuis fin septembre 2025, la France a de quoi se réjouir malgré un contexte économique et politique difficile. Une série ambitieuse réalisée sur nos terres a conquis le cœur des abonnés Canal+ et repoussé pour un temps les assauts des productions internationales. J’ai enfin pu voir Les Sentinelles, et c’est pour moi la meilleure série de 2025… ni plus ni moins.
Une adaptation de BD signée Canal+
Adaptée de la bande dessinée éponyme de Xavier Dorison et Enrique Breccia, diffusée sur Canal+, Les Sentinelles porte à l’écran une vision uchronique de la Première Guerre mondiale. Conçue par Guillaume Lemans, Xabi Molia et Raphaëlle Richet, et réalisée par Thierry Poiraud et Édouard Salier, cette série signée Federation Studios et Esprits Frappeurs revisite la Première Guerre mondiale. L’armée française y expérimente un sérum - le Dyxénal - destiné à créer des super soldats. Dans ce contexte mêlant science, guerre et polar, la série s’intéresse à la frontière séparant la science, le patriotisme et la barbarie.
L’histoire suit Gabriel Ferraud, jeune soldat déclaré mort au combat, ramené à la vie pour intégrer l’unité secrète des Sentinelles. Confronté à la violence du front et aux agissements de ses supérieurs, il découvre l’existence d’autres cobayes et d’un redoutable adversaire dans le camp allemand. Autour de Louis Peres gravitent Pauline Étienne, Thibaut Evrard, Carl Malapa ou encore Kacey Mottet-Klein, formant un casting solide au service d’un récit entre histoire et science-fiction. Louée pour son ambition visuelle et son ton “noir”, Les Sentinelles s’impose comme une relecture originale de la Der des Der.
Le premier épisode de la série Les Sentinelles est disponible gratuitement sur Canal+.

Une série ambitieuse "made in France"
La France a un incroyable talent… pour le cinéma et par extension les séries. L’industrie audiovisuelle française est l’une des plus prolifiques du monde et on peut remercier l’exception culturelle française et la chronologie des médias pour ça (même si ce n’est pas le sujet du jour). Les Sentinelles est le dernier rejeton des productions ambitieuses frappées du sceau “Canal+” après Le Bureau des Légendes, Engrenages ou encore Les Revenants dans un registre très différent, celui de l’uchronie.
J’ai toujours éprouvé un intérêt certain pour les uchronies, qu’elles soient en bandes-dessinées, en jeux vidéo, au cinéma ou sur le petit écran, et Les Sentinelles peut se vanter de redonner des couleurs à un genre qui revisite l’Histoire pour mieux la dépeindre. La nouvelle création de Canal+ s’éloigne sciemment des livres d’histoire et du roman national imposé à nos têtes blondes pour créer un univers alternatif prenant pour origines la Première Guerre mondiale. Il n’est pas question ici de relater des faits historiques, mais d’ancrer le récit dans une période historique qui a marqué le peuple français au fer rouge.

Les Sentinelles se distingue des téléfilms franco-français vus et revus sur TF1 et France TV par son envie de faire du “vrai” cinéma destiné au petit écran, et donc par ses visuels léchés, ses plans dignes des salles obscures et un savoir-faire évident. Que ce soient pour les costumes, les décors, l’éclairage… les équipes se sont données corps et âmes sur ce projet et cela se ressent. Bien entendu, la série ne cherche pas à reproduire le Paris des années 1910, mais à installer une ambiance entre Histoire, film de guerre et film noir avec une pointe de science-fiction, voire de fantastique.
C’est ce mélange des genres qui m’a particulièrement séduit. La France est souvent moquée par ses concitoyens pour son amour transi pour le drame social, la comédie et le polar. Il y a forcément un peu de ça dans Les Sentinelles (les chats ne font pas des chiens) et tant d’autres choses qui en font une œuvre singulière dans le paysage audiovisuel français contemporain. J’aimerais également m’attarder quelques instants sur les scènes d’action dignes des productions hollywoodiennes. Certes peu nombreuses, elles compensent leur rareté par une intensité rare qui m’a pris aux tripes et une farouche volonté d'en découdre. Je n'en attendais pas moins.

Les Sentinelles n’est pas parfaite pour autant, bien au contraire. Elle peine à faire vivre à l’écran sa myriade de personnages, étire parfois un peu trop son récit et n’utilise pas toujours à son plein potentiel les super soldats qu’elle met en scène. Puis la série s’éloigne fortement des bandes-dessinées, ce qui risque de déplaire aux puristes dont je ne fais pas partie. Pour moi, ce ne sont que des broutilles face au travail accompli et au résultat final. Il convient de capituler et de simplement jouir du moment lorsque le talent s'impose à vous.
J’en ai rêvé, Canal+ l’a fait. Les Sentinelles est une série à voir de toute urgence pour pouvoir dire d’ici quelques années : “J’y étais. J’ai tout vu.” !