À l’instar d’un certain Johnson, Microids n’est pas du genre à laisser les souvenirs précieux tomber dans l’oubli. L’éditeur français ressuscite Cobra, manga culte de Buichi Terasawa, avec la promesse de réaliser les rêves des fans sans qu’ils n’aient besoin d’une machine abracadabrantesque. Sortez votre rayon Delta, les pirates de l’espace vont tomber… de haut !
Un esprit sain dans un corsaire
Après une séance de rêve artificielle, un loisir vendu par la société Dream Corp qui fait fureur dans le futur, Johnson n’a pas les idées claires. Durant la séance, le jeune homme s’est vu en tant que Cobra, un glorieux aventurier disparu depuis des lustres. Et s’il ne s’agissait pas d’un rêve artificiel, mais d’une mémoire retrouvée ? Ni une ni deux, le héros se retrouve au milieu d’une drôle d’épopée où il doit affronter des hordes d’ennemis plus ou moins humains sur une multitude de planètes. Développé par les français de Magic Pockets, studio connu pour les jeux Koh-Lanta et diverses adaptations de séries animées, Space Adventure Cobra - The Awakening couvre les 12 premiers épisodes de l’anime. Les fans seront ravis de retrouver des extraits de l’anime de l’époque rythmant la progression, quand bien même ce procédé insisterait sur les grandes différences entre la partie strictement jouable et l’autre purement cinématographique. À l’ancienne, quoi !

Manette entre les mains, le soft édité par Microids prend la forme d’un jeu d’action-aventure en 2,5D qui tient plus du Run & Gun des années 1990 que du Metroidvania cuvée 2025, les passages non-linéaires étant rares par rapport aux séquences de tir/de plates-formes en ligne droite. Le but du jeu est de faire feu sur tout ce qui bouge avant que les projectiles adverses ne refroidissent nos ardeurs. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas quelques allers-retours à effectuer - afin de récupérer des bonus - ou que la course à la puissance est totalement absente puisqu’il y a des compétences à améliorer ainsi que des caractéristiques à débloquer. Parmi elles, nous retrouvons un grappin, des grenades cigares explosifs, un revolver capable de percer les boucliers ennemis et bien sûr le rayon Delta. Ce dernier bénéficie d’un tir guidé stoppant le temps, laissant le loisir au joueur de diriger le projectile à l’aide du stick directionnel. Cette mécanique, indispensable à la résolution des puzzles et conseillée pour anéantir les méchants les plus résistants, est bien convenablement exploitée dans les niveaux du jeu.

Pas assez grande gueule, Cobra
Le gameplay sans trop de chichis qui emprunte beaucoup à Contra (Operation Galuga), un peu à Metroid (Dread), est loin d’être déplaisant si l’on considère que ce Cobra est pensé pour le fan de la licence qui ne veut pas se prendre la tête avec un jeu bourré de mécaniques ou de choses complexes à retenir. Ceci étant dit, les Run & Gun, et globalement les jeux d’action-aventure-platformer, s’adressent habituellement à un public averti. Du genre à apprécier quand ça fuse dans tous les sens avec des contrôles qui répondent au doigt à l'œil, aux hitboxes précises et aux idées un rien originales. La création de Magic Pockets ne rentre pas dans cette catégorie bien garnie en 2025 avec des productions telles que Ninja Gaiden Ragebound, Shinobi Art of Vengeance ou encore The Rogue Prince of Persia. Cobra se contente de dérouler des niveaux au level design basique remplis d’adversaires classiques et des boss banals. Quant au mode 2 joueurs en coop, il est cantonné à une campagne spéciale sans grande saveur.

Alors que dans la série qu’elle adapte, Cobra est une grande gueule qui ose tout, le jeu vidéo est autrement plus timoré dans son approche. Pour commencer, la mise en scène est décevante et nous renvoie plusieurs années en arrière dans son exécution. Ensuite, les contrôles ne permettent aucune inventivité lors des affrontements. Il n’y a pas de quoi créer des enchaînements, pas plus qu’une mécanique permettant de parer, par exemple. Se baisser ou frapper au corps-à-corps prend du temps, les frames d’invincibilité du dash mène à des erreurs et il n’est pas rare de tomber d’une plate-forme alors que l’on souhaite juste viser un monstre en contrebas, la maniabilité étant inspirée de celle d’un Metal Slug (on tire dans la direction où l’on se déplace).

Heureusement, les développeurs ont eu la bonne idée d’ajouter une touche (LB) afin de viser sans bouger, le problème, c’est que dans cette configuration, il est quasiment impossible de ne pas prendre de dégâts quand les opposants sont nombreux ou lorsque les plates-formes se dérobent. La plupart du temps, les pics de difficulté viennent d’un level design mal adapté aux mouvements du joueur avec des dashs qui mènent sur des ennemis, des mines posées aux pires endroits et des herses aux hitboxes frauduleuses. On perd aussi pas mal de temps à recommencer les puzzles quand on tombe dans un trou, là où les autres jeux nous font réapparaître avec juste un peu de vie en moins. Puisque nous évoquons les puzzles, ils sont répétitifs mais ont la bonne idée de ne pas être trop nombreux. Enfin, l’exploration est réduite à sa plus simple expression : il n’y a aucune carte à afficher pour se repérer, ce qui n’est pas choquant pour des niveaux qui sont principalement de grandes lignes droites déguisées, alors que les bonus ne nécessitent pas de grands efforts de recherche. En bref, Space Adventure Cobra : The Awakening est non seulement classique : il excelle dans aucun de ses segments.

L’Homme de Verre à moitié plein ou à moitié vide ?
À partir du moment où les affrontements ne sont pas des plus intéressants et où l’exploration manque de profondeur, on est en droit de se demander ce que ce Cobra a pour lui. Rassurez-vous, il n’est pas dénué de qualités. Graphiquement, c’est certes (très) simple, mais ça répond plutôt bien au cahier des charges “Cobra-esque”. Attention, nous ne sommes pas en train de dire que le soft est beau, il a cependant le mérite d’être coloré en plus d’être lisible. Techniquement, le jeu tourne en 60 images par seconde, et même s’il y a des choses à redire du côté des animations, cette fluidité autorise des contrôles plutôt réactifs.

Cobra tente surtout d’apporter un peu de variété tout au long de ses 10 heures de jeu grâce à des séquences qui s’amusent avec le point de vue, qui demandent de diriger le héros en pleine chute libre ou bien obligent à gérer diverses situations (survive sous l’eau, rester près d’un bouclier de protection sur un véhicule qui avance, etc.). De gros efforts sont faits pour que le joueur ne s’ennuie pas, ce qui est louable, quand bien même les tableaux seraient trop longs pour insuffler un rythme enthousiasmant.
Conclusion
Points forts
- Les mécaniques du rayon Delta sont bien exploitées
- C’est fluide (60fps) et lisible, même à 2 en coop
- Bonne durée de vie : 10 heures environ
- Quelques efforts sont faits du côté de la variété des situations
Points faibles
- Beaucoup trop classique dans son gameplay alors que la concurrence fait rage dans ce genre
- Des combats qui manquent de profondeur
- Un level design trop banal qui encourage peu l’exploration
- Des imprécisions dans la maniabilité et les hitboxes
- Manque d’ambition dans tout ce qui touche à la présentation (animations, mise en scène, musiques)
Note de la rédaction
Il est difficile de savoir à qui s’adresse Space Adventure Cobra : The Awakening. Le pro du jeu d’action/plates-formes le trouvera quelconque en 2025 tandis que le fan hardcore de Cobra regrettera le manque général d’ambition pour raconter l’histoire qu’il aime tant. Le néophyte, lui, s’en voudra peut-être de se faire spoiler les 12 premiers épisodes du très bon anime avec un jeu de ce calibre. Néanmoins, le soft n’est pas dénué de qualités et même s’il y avait sûrement un tas de façons de mieux faire, il n’est pas non plus un attrappe-nigaud conçu par l’Homme de Verre pour piéger les héros légendaires. À l’image d’autres productions de l’éditeur, c’est sympa, ça s’inspire de plein de choses qui fonctionnent ailleurs, mais le résultat peine à apporter quoi que ce soit de vraiment transcendant.