Il y a près de deux décennies, un homme de loi américain s’est lancé dans une croisade virulente contre les jeux vidéo, en particulier la franchise Grand Theft Auto, avant de voir sa carrière s’effondrer sous le poids de ses propres excès.
Il n’est pas ici question d’un personnage de fiction, mais d’un véritable avocat, obsédé par la violence vidéoludique et particulièrement celle présente dans la licence GTA, qui, au final, s’est autodétruit sous les yeux de tous.
De la lutte judiciaire à l’obsession médiatique
L’avocat John Bruce Thompson s’est fait connaître au début des années 2000 par ses attaques répétées contre les industries culturelles, plaçant les jeux vidéo au centre de son combat contre la violence médiatisée. Il a notamment ciblé Rockstar Games, éditeur de la série Grand Theft Auto, mais aussi d’autres acteurs comme Valve ou les développeurs de Doom et de Mortal Kombat

En février 2003, dans une affaire tragique impliquant le meurtre de Jolynn Mishne, Thompson affirmait que le tueur était “obsédé” par GTA III, une thèse vivement contestée par l’accusé, qui répliqua : « Ce n’est pas GTA qui m’a poussé à commettre ce meurtre ». Il essaya ensuite de se positionner comme avocat du meurtrier, qu’il voyait comme une victime du studio derrière le jeu, tout en défendant déjà la famille de la victime, ce qui fut jugé déloyal et poussa le juge à le récuser.

Au fil des années, Thompson a multiplié les procédures contre Take-Two Interactive, Sony, ainsi que des chaînes de distribution comme Wal-Mart, affirmant réclamer des centaines de millions de dollars en dommages et intérêts au motif que GTA inspirait des actes criminels. Ses méthodes agressives se sont prolongées dans des lettres ouvertes ou des campagnes médiatiques : par exemple, il a menacé clairement le distributeur Best Buy en affirmant que « les amendes et les boycotts vont tomber sur vos magasins comme des flocons de neige ».
Chute professionnelle et répercussions
Malgré son acharnement, les succès judiciaires furent quasi inexistants. En 2007, Take-Two Interactive l’a assigné en justice, l’accusant d’avoir tenté d’interdire GTA IV et Manhunt 2, ce qui, selon les plaignants, allait à l’encontre du droit des entreprises aux États-Unis. Thompson leur répondit qu’il avait prié pour que Take-Two fasse quelque chose de si stupide pour pouvoir les détruire en justice. Au contraire, il a perdu le procès et sa lutte juridique s'enlisa de plus belle.

Ses échecs, associés à une réputation de harceleur (notamment envers ses confrères), entraînèrent en 2008 sa radiation du barreau de Floride, puis de tous les États américains. Le juge de la Cour Suprême refusa d’examiner son appel. En fin de compte, ce sont ses excès et sa radicalité sans nuance qui ont précipité sa chute : un véritable cas d’autodestruction médiatique.