Martin Scorsese : Comment la critique sévère de John Cassavetes a façonné sa carrière après Bertha Boxcar

Titre original : Il y a 53 ans, Martin Scorsese a dû faire face aux critiques d'un cinéaste légendaire : il a qualifié son film de “daube”

Avant de devenir l’un des cinéastes les plus influents de l’histoire, Martin Scorsese a connu un apprentissage fait de compromis, d’erreurs et de remises en question. En 1972, son film Bertha Boxcar a marqué un tournant décisif : un échec critique qui, grâce à une conversation brutale avec John Cassavetes, allait forger la naissance du véritable Scorsese.

Le baptême de l’industrie : Bertha Boxcar

Avant Taxi Driver ou Raging Bull, Martin Scorsese n’était encore qu’un jeune réalisateur cherchant à se faire un nom dans le cinéma américain du début des années 1970. C’est dans ce contexte qu’il signe en 1972 son second long-métrage, Bertha Boxcar, une comédie dramatique teintée de road movie. Le film, inspiré du livre Sister of the Road de Ben L. Reitman, suit les aventures de Bertha Thompson, une jeune femme parcourant l’Amérique de la Grande Dépression après la mort de son père.

Produit par Roger Corman, célèbre pour ses productions à petit budget et son rôle de découvreur de talents (Francis Ford Coppola, James Cameron…), Bertha Boxcar était avant tout une commande commerciale. Scorsese, encore débutant, y injecte pourtant déjà certains marqueurs de son style futur : une violence frontale, une tension morale sous-jacente et une imagerie religieuse marquée, notamment dans la scène de crucifixion du personnage de Bill Shelly (interprété par David Carradine). Malgré ces éclats de personnalité, le film — au budget de 600 000 dollars — reste perçu comme un exercice de style contraint.

Il y a 53 ans, Martin Scorsese a dû faire face aux critiques d'un cinéaste légendaire : il a qualifié son film de “daube”

La critique de Cassavetes et la naissance de Mean Streets

C’est après une projection préliminaire que Martin Scorsese reçoit la critique la plus marquante de sa carrière, signée de son mentor et ami John Cassavetes. Figure majeure du cinéma indépendant américain, Cassavetes n’y va pas par quatre chemins :

« Tu viens de passer un an de ta vie à faire une merde. C’est un bon film, mais tu es meilleur que ça. Éloigne-toi du marché grand public, fais quelque chose de différent. »

Touché en plein cœur, Scorsese comprend qu’il doit cesser de tourner pour les autres et se concentrer sur des projets plus personnels. Cassavetes lui demande alors s’il a un film qu’il veut vraiment réaliser. Scorsese lui parle d’un scénario inachevé intitulé Season of the Witch. Encouragé par cette conversation décisive, il retravaille le script, qui deviendra son chef-d’œuvre fondateur, Mean Streets (1973).