Derrière la virtuosité de sa mise en scène et l’aura de ses stars, ce projet illustre à quel point Hollywood joue gros lorsqu’il mise sur le prestige plutôt que sur la rentabilité.
C’est l’un des films les plus ambitieux et les plus risqués de l’année : Une bataille après l’autre, signé Paul Thomas Anderson, s’annonce comme un gouffre financier pour Warner Bros. Malgré un accueil critique dithyrambique (95 % sur Rotten Tomatoes), le long-métrage porté par Leonardo DiCaprio et Sean Penn ne parvient pas à attirer les foules.
Un pari artistique à 130 millions de dollars
Lorsque le studio a confié un budget colossal (entre 130 et 175 millions selon Variety) au cinéaste de There Will Be Blood ou Licorice Pizza, beaucoup ont levé un sourcil. Paul Thomas Anderson, réputé pour son cinéma d’auteur exigeant, n’avait jamais disposé d’un tel chèque. Et même avec une distribution prestigieuse, Une bataille après l’autre n’a rien d’un blockbuster calibré : trois heures de film, une classification R, aucun lien avec une licence existante, et un ton très éloigné des canons actuels du divertissement hollywoodien.

Résultat : après un démarrage correct à 22 millions de dollars aux États-Unis, le film plafonne désormais à 61,7 millions sur le sol américain et 163 millions à l’international. Or, en tenant compte d’un budget marketing d’environ 70 millions et du partage des recettes avec les exploitants, son seuil de rentabilité se situerait autour des 300 millions. Autrement dit, Warner pourrait perdre jusqu’à 100 millions de dollars sur cette seule production.
Un échec financier… mais pas artistique
Le studio a tenté de relativiser en rappelant que ses films ont rapporté plus de 4 milliards de dollars en 2025, mais le constat reste implacable : Une bataille après l’autre est un désastre économique. Pourtant, sur le plan artistique, c’est tout l’inverse. Porté par une mise en scène virtuose et des prestations habitées de DiCaprio et Penn, le film est salué comme l’un des meilleurs de l’année. Il s’impose déjà comme un favori pour la prochaine saison des récompenses, où Warner espère bien rentabiliser son investissement en prestige, sinon en dollars.

Cette situation illustre la fragilité du cinéma d’auteur à grande échelle : les studios continuent de financer des œuvres ambitieuses, mais le public, lui, privilégie les franchises et les formats plus digestes. Comme Killers of the Flower Moon avant lui, Une bataille après l’autre rappelle qu’à Hollywood, la gloire critique ne suffit pas toujours à sauver les comptes.