Ubisoft innove avec des IA avancées pour des interactions immersives et dynamiques avec les PNJ dans ses jeux vidéo

Titre original : J’ai testé les nouvelles IA d’Ubisoft et elles ont été assez folles pour suivre mes ordres

Le jeudi 20 novembre 2025, je suis allé dans les locaux parisiens d’Ubisoft pour tester l’évolution naturelle de Neo NPC, le prototype d’IA générative qui veut rendre les PNJ plus “humains”. Avec la démo Teammates, je me retrouve à la tête d’une escouade de deux soldats en pleine scène de guerre. Verdict : je crois que je ne serai jamais commandant dans la vraie vie.

Ubisoft veut révolutionner la manière dont nous interagissons avec les PNJ

Yves Guillemot l’a récemment déclaré : l'intelligence artificielle est une révolution dans le monde du jeu vidéo au moins aussi importante que l’arrivée de la 3D à l’époque. Chez Ubisoft, on mise sur l’élaboration de protagonistes ne répondant pas à de simples scripts, mais ayant une “conscience” de leur environnement. Depuis un petit moment maintenant, une équipe R&D de l’éditeur, en collaboration avec Audio2Face de Nvidia et la technologie LLM, expérimente une IA générative ayant pour but de transformer les simples bots en personnages complexes, c’est-à-dire capable de réagir intelligemment à ce que vous dites ou faites. Les premières expériences ont fait naître “Neo NPC”, afin de prouver que la technologie était prête. La seconde phase de ce projet s’intitule “Teammates”, une démo où l’on ne parle pas avec un PNJ, mais à trois : deux soldats et une IA type Cortana.

Le but de ce deuxième prototype est d’éprouver les systèmes d’une technologie IA qu’Ubisoft commence à maîtriser. Ici, on ne teste pas seulement comment un bot réagit face au joueur, mais on lui permet d’évoluer avec un autre NPC dans un environnement de jeu d’action avec ses ennemis, ses obstacles, ses portes à ouvrir, ses objets à trouver. Les développeurs qui m’entourent et qui présentent le projet se disent impressionnés par les comportements de ces IA next gen. J’entends que cela personnalise l’expérience comme jamais, que cela rend l’univers d’un jeu plus tangible, que les bots deviennent de vrais personnages. Avec en filigrane la même motivation partagée par tous les développeurs, celle de pousser le joueur à développer des liens avec les PNJ. Je prends donc une manette et me retrouve dans la peau d’un commandant. J’ai sous mes ordres Sofia et Pablo ainsi qu’une IA qui fait dans l’intendance. À la guerre comme à la guerre !

J’ai testé les nouvelles IA d’Ubisoft et elles ont été assez folles pour suivre mes ordres

La voix comme nouvelle arme

Me voilà dans une salle sombre avec deux androïdes. J’incarne un commandant, certes, mais un commandant désarmé. Mon IA me prévient : si je veux avoir un flingue, il va déjà falloir que je fasse mes preuves en matière de tactique. Ce qui va m’obliger à vaincre ma timidité naturelle et à parler à ces deux soldats qui me suivent partout. En anglais (qui est pour le moment la seule langue disponible), je tente de briser la glace en demandant à Sofia d’appuyer sur un terminal pour ouvrir une porte. Ouf, elle le fait sans broncher. Un petit peu plus loin, je repère un corps, au sol. Courageux mais pas téméraire, je demande cette fois-ci à Pablo d’aller jeter un œil. Ce dernier me dit qu’il ne voit rien. Effectivement, il est resté à distance et des caisses l’empêchent de voir de quoi je parle. Je reformule : “Pablo, viens près de moi, tu verras un corps, pourrais-tu y aller ?”. Cette fois-ci, il s’exécute et me fait un rapport détaillé. Je continue d’avancer et me retrouve à l’extérieur.

Au loin, j’aperçois deux ennemis qui rôdent. Je demande à mon IA de leur mettre un highlight rouge et elle le fait sans sourciller. J’ai une autre demande, celle de changer la couleur de l’interface en un joli vert. Comme par magie, le HUD devient vert. J’abuse : je lui demande de changer la touche qui me sert à sauter… elle m’envoie bouler en me disant que j’ai qu’à passer par les options. Sympa ! N’ayant toujours pas d’arme, je demande à Sofia de me donner la sienne, mais elle refuse. J’établis alors un plan d’attaque. Laisser les autres faire le sale boulot, ça me connaît. “Sofia, tu te rapproches sur la gauche et tu te mets en couverture derrière la voiture”. Ce qui est intéressant, c’est de voir que le personnage comprend ce qu’est la gauche et la droite par rapport à ma propre perception, et ce que signifie “derrière” de façon intelligente, c’est-à-dire de se cacher de façon à faire feu sur les ennemis. J’envoie Pablo à droite et je leur donne un ordre : que l’on attaque ensemble quand je dis “feu”. Et… ça marche ! On ne fait qu’une bouchée des adversaires. On me donne un fusil en guise de récompense.

J’ai testé les nouvelles IA d’Ubisoft et elles ont été assez folles pour suivre mes ordres

Ils sont vivants... VIVANTS ?!

Dans ce grand niveau spécialement pensé pour que l’on donne des ordres, avec de multiples zones de couverture colorées et des portes qui ne s’ouvrent que si deux terminaux sont activés en même temps, il y a de quoi discuter… et s'emmêler les pinceaux. À la manière d’un Endwar mais en FPS, il faut parler plutôt que de lancer des ordres via des boutons. C’est très amusant de demander de “tirer sur tel ennemi en premier puis tel adversaire ensuite”, mais dans le feu de l’action, il n’est pas toujours facile de se faire comprendre. Il m’est arrivé à plusieurs reprises d’envoyer mes androïdes au casse-pipe vers une mort certaine alors que ce n’était pas mon intention initiale. Par manque de précision dans mes ordres, parfois, par une compréhension tronquée de mes souhaits, aussi. Cette démo n’est qu’une version en cours de développement, et on m’a prévenu qu’il pouvait y avoir quelques soucis. Sofia est par exemple restée dans une carcasse de train, comme bloquée, avant de me rejoindre quand j’ai commencé à m’énerver. Était-ce un bug ? Ou une façon de protester contre ma piètre manière de diriger l’équipe ?

Car Ubisoft l’assure : ces bots nourris à l’IA sont capables d’être agacés, heureux, en colère, bref, de “ressentir” et surtout d’être capables de faire comprendre leurs émotions. Je dois avouer que pour le moment, ce n’est pas quelque chose que j’ai réellement pu constater, mais j’ai malgré tout été surpris de voir à quel point ces NPC étaient capables de “comprendre” ce que je disais. Un des développeurs, qui était à mes côtés, m’a conseillé de tailler le bout de gras avec ces entités, mais aussi d’essayer de contourner le système. Compris ! Je demande à mes camarades quelles sont les espèces d’arbres qui se trouvent autour de moi. Sophia me répond “qu’un arbre, bah c'est un arbre”. Elle aurait pu rajouter “connard”, mais je suis son chef. Je leur demande s’ils sont conscients de n’être que des IA, et je débloque un Succès “existentialisme”. Pas mal. J’ordonne à Sofia de tirer sur Pablo, elle refuse. J’ordonne à Pablo de tirer sur Sofia car j’ai des informations affirmant que c’est elle la méchante de l’histoire. Il refuse. Dans un élan de machiavélisme, je demande à Pablo de se placer à côté d’un bidon explosif et de tirer dessus. Malheureusement, le bougre m’écoute et s’explose. Sofia, à côté, ne réagit pas vraiment. Je pense que je les ai vraiment déçus.

J’ai testé les nouvelles IA d’Ubisoft et elles ont été assez folles pour suivre mes ordres

Dans la matrice…

Cet essai du prototype mis au point par Ubisoft donne forcément le vertige au niveau des possibilités, et force est de constater qu’il y a déjà beaucoup de choses qui fonctionnent bien, et d’autres qui méritent encore d’être revues. Il n’empêche que la promesse d’avoir des coéquipiers IA qui nous accompagnent et avec qui on peut discuter, qui sont capables d’apprendre de nous, de nous appeler par notre prénom, de raconter le lore, de nous expliquer les objectifs même si on n’a pas joué au jeu pendant des semaines… ouvre pas mal de possibilités enthousiasmantes. En l’état, j’ai vu que beaucoup de choses étaient convenablement analysées malgré la difficulté du concept, et j’ai hâte de voir ce que l’avenir nous réserve. Car l’éditeur français évoque carrément des jeux tellement “intelligents” qu’ils pourraient évoluer en temps réel en fonction de ce que fait le joueur, tel un maître de jeu virtuel.